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Dictionnaire des journaux 1600-1789, sous la direction de Jean Sgard, Paris, Universitas, 1991: notice 635 JOURNAL D'ÉDUCATION 1 (1768-1769, 1776-1778) 1] Titres Journal d'éducation. Mois de [...] «Présenté au Roi par M. Leroux, Docteur ès-Arts en l'Université de Paris. Maître de pension à Amiens. Paris.» Les numéros d'octobre à décembre 1778 s'intitulent: Journal d'éducation dédié et présenté au Roi. Il contient aussi le Mentor de la jeune noblesse dédié à S.A.S. Mgr. le Duc de Chartres et agréé par ce Prince pour l'éducation de ses fils. 2] Dates Janvier 1768 - mars 1769; janvier 1776 - décembre 1778. Publication mensuelle. Au total, 51 numéros ont dû paraître: 12 livraisons en 1768, 3 en 1769 (janv.-mars), 12 en 1776, 12 en 1777, 12 en 1778. Le prospectus est approuvé par le censeur royal le 5 septembre 1767. Le privilège du 23 septembre 1767 (registré le 27 octobre) est accordé pour le Journal d'éducation ou Projet d'émulation pour l'éducation de la jeunesse. Le 2e privilège est du 31 décembre 1775, et il est registré le 2 janvier 1776. Ces deux privilèges sont accordés chacun pour six ans. 3] Description Le volume annoncé est de 96 p.; le volume effectif est le plus souvent de 96, parfois 84, 88 ou 104 p., ou suivi d'un supplément paginé de 1 à 12. Format in-8º, 110 x 180. Devise: Inde tibi tuaeque Reipublicae, quod imitere capias / Inde foedum inceptu, foedum exitu, quod vites (Tite Live, L. I, in Praef.). Illustration: vignette en page de titre; portrait du duc de Chartres (né en 1747) en frontispice du prospectus d'avril 1778. Certains numéros de 1776 et 1777 comportent des tableaux pédagogiques disposés sur un dépliant. 4] Publication Imprimeurs: Amiens, veuve Godart (janv.-févr. 1768), puis veuve Caron (mars-juin, août et oct. 1768); Paris, P.A. Le Prieur, rue Saint-Jacques (divers numéros de 1768 et 1769); puis Couturier père, Galerie du Louvre (janv. 1776 - mars 1778), enfin d'Houry imprimeur des ducs d'Orléans et de Chartres, Palais-Royal (avril-déc. 1778). Libraires associés: Paris, Durand neveu et Couturier fils; Versailles, Fournier. En janvier 1768, la souscription a lieu à Paris chez Durand neveu, à Amiens chez la veuve Godart et chez le sieur Sire, maître de mathématiques, petite rue des Carmes où se tient le bureau du journal. Cette souscription est de 12 # par an en 1768-1769, de 12 # à Paris et 15 # en province en 1776-1778; elle doit s'élever à 24 # pour la nouvelle formule. Un avis aux souscripteurs (janv. 1776) apporte des garanties pour la continuation du journal, suspendu en 1769 (l'argent des particuliers est placé en dépôt selon la recommandation du magistrat). 5] Collaborateurs Fondateur et principal auteur: Charles LEROUX (cf. DP2). Collaborations occasionnelles de divers maîtres de pension et professeurs de collège, en particulier Guy Le Boucq, professeur de rhétorique à Chartres. Une liste de ces «grands éducateurs» est fournie par le numéro d'octobre 1776, qui caresse le projet d'une «Académie d'Education». 6] Contenu Les objectifs sont exposés dans le Discours préliminaire en tête du numéro de janv. 1768 (repris en janv. 1769 et janv. 1776) et dans celui, plus construit, qui paraît en juillet 1776. Il s'agit d'offrir, sous une forme périodique, une «collection de principes incontestables et de morceaux choisis» empruntés aux meilleurs auteurs qui ont écrit sur l'éducation et ses trois domaines, «religion, sciences et mœurs». La plupart des numéros sont distribués en trois parties: «éducation religieuse», «éducation littéraire», «annonces, avis et demandes du public». Le prospectus d'avril 1778 définit la nouvelle formule (Mentor de la jeune noblesse) par ses destinataires: les «chefs de famille» (en particulier les «princes et souverains»), les «instituteurs», «tous les jeunes citoyens qu'on veut élever noblement». De fait, les numéros d'octobre et décembre 1778 s'organisent en deux parties: «l'une pour les Instituteurs et les élèves adolescents fort avancés dans les études, et l'autre à l'usage des Enfants qui les commencent». Tout en se défendant de céder à la mode des «plans d'éducation», Leroux compile sans vergogne toutes sortes de traités, discours et maximes sur les divers aspects de l'éducation: religion, étude, langues, lettres françaises et anciennes. Il reproduit, cite et analyse ces écrits dans une optique résolument traditionaliste, hostile à la «Philosophie actuelle» ou «fausse Philosophie», et en se réclamant de l'orthodoxie religieuse, mais aussi de J.J. Rousseau (mars 1776) et de Linguet (mai-juil. 1778). Il propose de longs extraits des abbés André, Auger, Delille, Fleury, Garnier, de Langeac, du chevalier de Linière, de M. de La Martinière, des abbés d'Olivet, Pluche, etc., ainsi que de L.S. Mercier (Songes philosophiques), de Roland de La Platière, de A.L. Thomas (Eloge du Dauphin). Sont souvent mis à contribution les «éducateurs» collègues de Leroux, auxquels il emprunte des dialogues fictifs, des récits édifiants («anecdotes historiques»), des éloges de la famille royale. La section «annonces, avis et demandes» comporte des éléments très divers sur la vie des pensions et collèges: publicité pour les établissements (régime des études, prix de pension), liste du personnel enseignant en Artois et en Picardie, extraits abondants des exercices publics soutenus dans les classes de rhétorique, courrier des lecteurs proposant réflexions et matériaux pédagogiques (concours d'énigmes, vers latins, règles de grammaire, etc.), des annonces et des analyses des livres nouveaux relatifs à l'éducation; dans les numéros de 1777 et 1778, le texte intégral de «scènes», «proverbes» ou «comédies» présentés dans les collèges (par exemple La Journaux-manie et La Sophomanie ou les Esprits forts). 7] Exemplaires Seule collection connue: B.N., R 23087 (juil.-déc. 1768), R 23088 (janv. 1769), R 23089 (févr. 1769), R 23090-23095 (pour les 6 volumes semestriels, janv. 1776 - déc. 1778); R 24443 et R 3033 pour le prospectus d'avril 1778 en deux exemplaires. Les lacunes de cette collection sont comblées par Ars., 8º S 3509: janv. - juin et juil. - déc. 1768, janv. - mars 1769. 8] Bibliographie H.G.P., t. I, p. 314. Le Journal d'éducation reproduit quelques éloges de son activité publiés entre autres dans les Affiches de province (17 juil. 1776) ainsi que les lettres d'encouragement reçues de d'Alembert, Buffon, Meusnier de Querlon, etc. Historique Unique en son genre au XVIIIe siècle, le Journal d'éducation n'est pourtant pas le seul ouvrage de Charles Leroux, que le souci infatigable de se faire connaître en se rendant «utile» a poussé sur les voies de l'invention scientifique et de l'activisme éducatif, sinon de l'innovation idéologique (cf. DP2). L'échec de la première série du Journal d'éducation, qui s'interrompt au début de 1769, paraît dû à des carences financières insurmontables (évoquées dans le numéro de juillet 1776). L'insuccès rapide du Mentor de la jeune noblesse (qui cesse après son nº 3) est peut-être lié au doublement du prix de souscription. Mais le public peut aussi avoir été rebuté par l'allégeance (mal récompensée) que Leroux professe à l'égard des princes du sang, dont il réclame avec insistance le patronage. On doit enfin imputer ce fiasco aux hésitations et à l'incohérence d'un périodique qui se veut spécialisé, mais qui a bien du mal à délimiter son domaine, à définir ses objets, à organiser ses niveaux de discours. Rançon d'une visée trop ambitieuse? Ce Journal d'éducation nous intéresse pourtant à plus d'un titre: il se fait l'écho de l'effervescence pédagogique de la période; il nous informe à la fois sur les méthodes préconisées et sur les pratiques effectives; il offre un éclairage utile sur les carrières, les échanges, les modes d'activité d'un «lobby» enseignant qui organise ses réseaux de concurrence et de solidarité en ces années 1760-1780 où le champ pédagogique est en pleine refonte. Autant dire qu'il convient de lire le Journal d'éducation à la lumière des travaux de D. Julia, M.M. Compère, R. Chartier et de leurs coéquipiers (voir D. Julia, Les Trois Couleurs du tableau noir, Belin, 1981; «La Naissance du corps professoral», dans Actes de la recherche en sciences sociales, nº 39, sept. 1981; Répertoire des collèges d'ancien régime, 2 tomes parus, CNRS; Atlas de la Révolution française, t. 2, «L'Enseignement, 1760-1815», EHSS, 1988; M.M. Compère, Du collège au lycée (1500-1850), coll. Archives, Gallimard-Julliard, 1985). Eric WALTER
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