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Dictionnaire des journaux 1600-1789, sous la direction de Jean Sgard, Paris, Universitas, 1991: notice 377 ÉPHÉMÉRIDES DU CITOYEN (1765-1772) 1] Titres Ephémérides du citoyen ou chronique de l'esprit national. Ephémérides du citoyen ou Bibliothèque raisonnée des Sciences morales et politiques (à partir du t. VI, sept.-oct. 1766, qui existe aussi avec l'ancien sous-titre). Continué par: Nouvelles éphémérides économiques (1774-1776). 2] Dates 47 volumes publiés du lundi 4 novembre 1765 au t. III de 1772 (correspondant théoriquement au mois de mars mais portant une approbation du censeur datée du 18 septembre). Date du privilège: 14 novembre 1765. Paraît 2 fois par semaine, le lundi et le vendredi; puis à partir de 1767, à raison d'un tome paraissant le 20 de chaque mois. Retard croissant à partir de 1769 (le t. IV de 1769 paraît en mai; le t. I de 1770 paraît en avril... et le t. I de 1772 en juin). En 1766, 7 ou 8 livraisons par mois jusqu'à la fin octobre; à partir de 1767, 12 tomes portant la date de l'année; mais en 1769, par exemple, seuls les 9 premiers paraissent avant la fin décembre. Datation des volumes. I: t. I, nov.-dec. 1765; t. II, janv.-févr. 1766. II: t. III et IV, mars - mai 1766. III: t. V et VI, juil. - oct. 1766. A partir de 1767, 6 volumes par an réunissant chacun 2 tomes mensuels (1767, I-II, 1767, II-III, etc.). 3] Description En 1765 et jusqu'en octobre 1766, chaque vol. réunit 2 tomes comportant chacun 17 ou 18 livraisons; à partir de 1767, chaque volume réunit deux tomes mensuels. Vol. I: t. I, 272 p. + table et errata; t. II, 272 p. + table (les tomes sont généralement de 288 p. en 1766); à partir de 1767, les tomes mensuels ont généralement entre 220 et 276 p.; le dernier (t. III de 1772) a 216 p. Cahiers de 16 p. in-8º, 98 x 166. Devise: Quid pulchrum, quid turpe, quid utile, quid non. 4] Publication Paris. Nicolas Augustin Delalain, rue Saint-Jacques, puis Delalain et Lacombe, quai Conti, à partir de mai 1766, puis Lacombe (seul), rue Christine, à partir de 1769. Imprimeur: Didot (mentionné à partir de 1769). En 1765, l'abonnement de 4 mois: 7 # pour Paris, 9 # pour la province (la feuille séparée: 5 s.). A partir de 1767, le volume mensuel, broché: 36 s.; souscription: 18 # par an pour Paris ou 24 # pour la province. En 1768, 400 exemplaires étaient distribués: il y avait 160 abonnés (Schelle, p. 124). Le tirage s'éleva à 500 exemplaires sous la direction de Du Pont en 1769 (Schelle, p. 124). 5] Collaborateurs Fondateur: abbé Nicolas BAUDEAU. Auteurs ou directeurs successifs: N. Baudeau (1765-1768), P.S. Du Pont (direction effective à partir de mai 1768, officielle à partir de janvier 1769). Collaborateurs réguliers: Quesnay (signature A ou Alpha), Mirabeau (signature B), Du Pont (signature H), Baudeau (signature L ou LB), Roubaud (signature G ou R), Vauvilliers (signature Y). Collaborateurs occasionnels: Turgot, Saint-Péravy, l'abbé de L'Ecuy, La Vauguyon, le margrave de Bade-Durlach. 6] Contenu Contenu annoncé dans le dernier volume de 1766 pour la nouvelle formule: 1) Pièces fugitives, morales et politiques. 2) «Extraits raisonnés et critiques des livres nouveaux, étrangers ou nationaux, sur les sciences économiques». 3) «Réflexions patriotiques sur les grands événements publics». En 1765-1766, chaque feuille contient un texte unique qui s'étend parfois sur plusieurs numéros (exemples de sujets traités: «Des feuilles périodiques», «De l'Esprit agricole», «De l'Education nationale», «Du commerce des Indes», «Des anciens Francs», etc.). A partir de 1767, 3 parties dans chaque tome mensuel: 1) Pièces détachées. 2) Critiques. 3) Evénements. Dans les dernières années, il s'y ajoute une 4e partie consacrée aux annonces. Principaux centres d'intérêt: tous les thèmes physiocratiques, à partir de 1767: le «produit net»; la liberté du commerce et du travail; la malfaisance de la corvée; la meilleure forme de gouvernement; l'abolition de l'esclavage; l'assistance publique; l'impôt; la population... 7] Exemplaires B.N., Z 21914-21947. 8] Bibliographie B.H.C. et H.G.P. Réédition: Feltrinelli, Milan, 1969. – Schelle G., Du Pont de Nemours et l'école physiocratique, Paris, 1888. – Weulersee G., Le Mouvement physiocratique en France (1756-1770), Paris, 1910. – Turgot, Œuvres, éd. G. Schelle, t. III, Paris. – Economie et population. Les doctrines françaises avant 1800. Bibliographie générale commentée, Paris, 1956. Les Ephémérides du citoyen, fondées par l'abbé Nicolas Baudeau, paraissent d'abord deux fois par semaine (le lundi et le vendredi), à partir du 4 novembre 1765. Le journal soutient alors un mercantilisme modéré et libéral, tout en faisant l'éloge de l'«esprit agricole». En 1766, Baudeau engage la discussion avec Le Trosne et finit par se convertir entièrement à la physiocratie (13 oct. 1766, t. VI, p. 195). A partir de janvier 1767, les Ephémérides, ou Bibliothèque raisonnée des sciences morales et politiques (nouveau sous-titre) paraissent sous forme d'un volume mensuel: elles sont désormais l'organe officiel des disciples de Quesnay qui ont perdu le Journal de l'agriculture à la fin de l'année précédente. De mars à juin 1767, les Ephémérides publient notamment le Despotisme de la Chine où Quesnay esquisse la théorie du «despotisme légal». C'est, semble-t-il, dans les Ephémérides d'avril 1767 qu'apparaît pour la première fois le mot physiocratie (sous la plume de Baudeau, p. 121-122). Le journal publie alors de nombreux articles de Baudeau (sur le luxe, sur le tableau économique, sur la réforme des tailles, etc.) et de Mirabeau; une lettre de Le Trosne «sur la nécessité de l'entière liberté du commerce des grains» (nov. 1767), un Traité de l'administration des chemins de Du Pont... En 1768 les Ephémérides se renforcent grâce à de nouveaux collaborateurs: l'abbé Pierre Joseph André Roubaud («De la richesse de l'industrie», mai 1768); le jeune La Vauguyon, duc de Saint-Mesgrin, fils du gouverneur des Enfants de France (lettres en réponse aux Doutes de Mably). En mai 1768, Baudeau (qui quittera la France pour la Pologne en novembre) laisse la direction effective des Ephémérides à Du Pont qui rédige désormais une grande partie du journal: il traite du «produit net», de la population, de l'abolition de l'esclavage, de la liberté de la presse, de la corvée, de la meilleure forme de gouvernement, de l'impôt... A partir de janvier 1769, Du Pont dirige officiellement la publication. Sans doute à l'instigation du contrôleur général Maynon d'Invaut, il mène campagne pour la liberté du commerce colonial et contre le monopole de la Compagnie des Indes (1769, t. VIII, X et XI). Les Ephémérides défendent encore plus activement la liberté du commerce des grains, surtout pour parer aux effets des Dialogues de Galiani (1769, supplément au t. XI, t. XII; 1770, t. I, IV, VI, etc.). Dès 1767 Quesnay aurait voulu obtenir pour les Ephémérides la protection officielle du gouvernement en les faisant dédier au Dauphin (le futur Louis XVI). En juin 1768, elles publient une lettre datée de Versailles qui fait un grand éloge du prince qui a daigné «conduire lui-même la charrue». Une épître dédicatoire avait été préparée pour paraître en janvier 1769 mais Mirabeau, qui tenait à la liberté du journal, fit échouer l'affaire. Cependant les Ephémérides mettent en valeur l'appui donné aux idées physiocratiques, et surtout à la liberté d'exportation des grains, par certains parlements (arrêté du Parlement de Toulouse publié dans le numéro de novembre 1768; lettre au roi du président du parlement d'Aix, cité dans les Ephémérides de juillet 1768...), par des sociétés d'agriculture et des chambres de commerce (déclaration de la chambre de commerce de Picardie citée dans les Ephémérides de septembre 1768). L'organe des économistes s'efforce également de faire valoir le ralliement, réel ou supposé, d'écrivains: Du Pont publie une longue analyse des Saisons de Saint-Lambert (1769, t. III et suiv.) et deux fables de Diderot (1769, t. V: «Le Marchand de mauvaise foi»; et dans le t. XII, paru en février 1770: «Le Bal de l'Opéra»). Diderot écrit par ailleurs un compte rendu assez favorable des Ephémérides de 1769 (t. V à VIII): Grimm le publiera avec des commentaires dans la Correspondance littéraire datée du 15 novembre (Diderot, Œuvres complètes, Hermann, t. XVIII, p. 92-105). Voltaire qui avait raillé certaines thèses physiocratiques dans L'Homme aux 40 écus (1768), fait l'année suivante l'éloge des Ephémérides du citoyen, «ouvrage digne de son titre» (Défense de Louis XIV contre l'auteur des Ephémérides, Œuvres, éd. Moland, t. XXVIII, p. 327). Dans la presse, le Journal encyclopédique se montre favorable («cet ouvrage devient tous les jours plus intéressant, plus cher aux citoyens», 1er juil. 1768) ou du moins neutre, tandis que le Journal de l'agriculture, très hostile depuis 1767, se rapproche de l'organe des économistes à partir de juin 1770, sous la direction de Roubaud. Sous l'impulsion de Du Pont, les Ephémérides avaient progressé et le tirage avait été porté à 500 exemplaires; mais Baudeau avait laissé le journal avec un déficit annuel de 1500 livres et la situation financière était souvent difficile. D'autre part, Du Pont manquait souvent de matériaux; Turgot vint plusieurs fois à son aide en trouvant des contributions dans son entourage. Surtout il lui donna à publier ses Réflexions sur la formation et la distribution des richesses, écrites en 1766. Elles parurent dans les Ephémérides de 1769, t. XI et XII, et de 1770, t. I. D'importantes modifications opérées par Du Pont pour la première partie, provoquèrent de vives protestations de l'auteur (2 févr. 1770). Cependant Turgot devait continuer à assister Du Pont de ses conseils et parfois de ses deniers (voir les lettres de Turgot dans ses Œuvres, éd. Schelle, t. III). A partir de 1770, les Ephémérides subissent le contrecoup de la baisse d'influence des idées qu'elles défendent: sous l'effet de la hausse des prix et de la crise frumentaire, le gouvernement suspend la liberté d'exportation des grains (14 juil. 1770) et dès le renvoi de Choiseul (23 déc. 1770), Terray rétablit les anciens règlements sur leur circulation dans le royaume. Le ministre charge un censeur de surveiller spécialement les productions de l'Ecole, en particulier les Ephémérides. L'intérêt du public est moindre: la lutte du chancelier Maupeou contre les parlements captive l'attention en 1771. Le journal manque à la fois de souscripteurs et de correspondants. Les volumes paraissent avec un retard croissant. Quand la suppression des Ephémérides est notifiée à Du Pont, en novembre 1772, seuls les trois premiers volumes de l'année ont paru. Du Pont ne sait alors comment se libérer à l'égard de ses abonnés et il a 15 000 francs de dettes. Il n'aura aucune part aux Nouvelles Ephémérides du citoyen lancées par Baudeau en 1774. Georges DULAC
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