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Dictionnaire des journaux 1600-1789, sous la direction de Jean Sgard, Paris, Universitas, 1991: notice 286 COURRIER DU BAS-RHIN (1767-1809?) 1] Titres Courier du Bas-Rhin. Continuation de Cleffsche Courant (C.B.R., 22 août 1767). 2] Dates Du 1er juillet 1767 à 1807, au moins. Dernier numéro consulté (coll. privée): 20 janvier 1807. J. Kirchner (1931, p. 243) pense qu'il a duré jusqu'en 1809. Gazette publiée avec privilège du roi de Prusse. Puis plus tard, avec celui de «S.A.I.R.» (1807). Prospectus signalé dans la Courte introduction au nº 1. Périodicité annoncée: bihebdomadaire paraissant le mercredi et le samedi. En général, 105 livraisons par an. 3] Description Composition du volume: à notre connaissance il n'existe aucune collection complète. Pour le détail, voir section 7. Cahier de 8 p. par livraison, in-4º, 163 x 203 (ex. de Munich pour 1767). A l'occasion, suppléments de 2 p.; pagination continue annuelle. 4] Publication Clèves, veuve Sitzmann, ou chez les directeurs de la Gazette. A partir du nº 61 (26 juil. 1794): Wesel, chez les directeurs de la Gazette; à partir de mai 1806 à Düsseldorf (Ester, 1912). En 1767: abonnement de 36 livres en France, 24 livres à Clèves (B.P. du 22 août 1767). L'abonnement à Paris était passé à 42 livres en 1769 (C.B.R. de 1769, p. XV); même tarif en 1770 (C.B.R., 19 mars 1770); et en 1779 (Hatin, p. 49). En Hollande, la feuille coûte 9 florins (C.B.R., nº 94, 22 nov. 1783). Le tirage d'un numéro revient à 100 livres en 1775 (C.B.R., 31 mai 1775). On estime le tirage à un peu plus de mille en année moyenne, beaucoup plus quand les circonstances politiques favorisent la gazette. On a quelques chiffres précis d'abonnements pour la période 1793-1801, ceux-ci passent de 1340 au début de la période à 530 à la fin (voir DP2) Liste des diffuseurs en France (nº 19, 7 mars 1770, p. 145) et en Hollande (nº 93, 19 nov. 1783). 5] Collaborateurs Fondateur: Jean MANZON (voir DP2). Son fils lui succède en 1798; il collaborait au journal depuis 1795. Collaborateurs réguliers: à l'origine, administration en commun avec les responsables de la Loterie de Clèves, Griethuysen et Schomaker; à partir de 1769, contrôle d'un fonctionnaire prussien von Bernuth (C.B.R., 19 juil. 1769); divers correspondants parisiens: Jean-Baptiste Saint-Marie Plumex (1767-1773), André-Guillaume Contant d'Orville (automne 1768); Antoine-Joseph Aubry de Julie (1768-1773 au moins) (Moureau, 1981). Une lettre de Manzon à Stanislas-Auguste Poniatowski (16 avril 1774, Varsovie, AGAD) signale qu'à cette date, son correspondant parisien est recherché par la police, sans doute Plumex, arrêté le même mois (Moureau, 1981, p. 67). Peut-être aussi aux mêmes dates: l'abbé Maury et Linguet. «Bulletinistes» anonymes tirant leurs informations de l'entourage de l'abbé Terray et de Saint-Florentin. Stanislas-Auguste Poniatowski ne dédaignait pas de lui faire passer des informations mises en forme (DP2). Avant de venir à Clèves, Manzon avait travaillé chez Marc-Michel Rey à Amsterdam; il continua à entretenir avec lui les meilleures relations: traduction de Pilati di Tassulo en 1768 (de Booy, 1960) et diffusion par le Courrier des bonnes feuilles du Militaire philosophe (Mortier, 1970). Manzon servait d'intermédiaire dans la diffusion vers l'Est des nouvelles à la main françaises et des papiers anglais (DP2, art. «Manzon»); il avait un correspondant personnel à Londres (lettre du 17 nov. 1772: Varsovie, AGAD) et publia, entre autres, une sorte de pré-originale des Mémoires secrets de Bachaumont fournie par ses correspondants parisiens, au premier chef par Aubry de Julie (Moureau, 1981). Frédéric II y aurait écrit (Ester, 1900, p. 99; Benzel, 1912, p. 43). 6] Contenu Le Prospectus signalé dans le nº 1 du 1er juillet 1767 reste introuvable. Une Courte introduction expose (ibid.) le projet de Manzon pour son Courrier: «Nous savons qu'une feuille périodique n'est ni une dédicace à un grand seigneur, ni la recette d'un spécifique nouveau, ni une ordonnance de médecine, ni un sermon; encore moins un manifeste entre deux puissances [...] Nous avouons donc impunément qu'une gazette n'est pas par elle-même un ouvrage fort essentiel, tout au plus elle peut acquérir un degré d'importance par la tournure qu'on lui donne: et c'est à ce côté favorable et intéressant que nous nous attacherons surtout. [...] Une gazette, nous ne saurions trop le redire, est une petite machine qui produit de petits effets; mais cette machine est compliquée et ne se meut que par une infinité de ressorts». Rubriques des «Nouvelles politiques» et des «Nouvelles littéraires» classées géographiquement; publicité en fin de livraison. A l'origine, le Courrier avait l'ambition d'être à la fois une gazette et un journal littéraire dans le format et la pagination d'une gazette. La distinction entre rubriques tendit rapidement à s'atténuer puis à disparaître, alors même que s'amenuisait la partie littéraire du journal. Dans les premières années, on trouve des extraits et des comptes rendus d'ouvrages français et allemands, des pièces fugitives, des informations sur les découvertes dans les sciences et sur le progrès idéologique (économie, philosophie), dont l'importance est évidemment le fait du rédacteur principal lui-même passionné de ces questions comme de polémique anti-jésuite. Pour l'essentiel, durant ses quarante années d'existence, le Courrier du Bas-Rhin fut un périodique d'information politique sur l'Europe, l'Amérique (grand intérêt pour la guerre d'Indépendance) et, à moindre degré, la Porte et l'Amérique du Sud. Les nouvelles de l'Est européen sont particulièrement copieuses, bien que leurs sources soient souvent biaisées ou trop officielles (v. supra). Le minimum de nouvelles «allemandes», spécialement prussiennes. Dans les premières années du périodique, beaucoup d'informations littéraires: Voltaire naturellement, mais aussi le quotidien de la vie des théâtres et des belles-lettres, avec un intérêt marqué pour la littérature de polémique politique ou religieuse. Petites annonces en fin de livraison (dont résultats de la loterie). 7] Exemplaires Un seul recueil connu pour les années 1767-1768: Bayerische Staatbibliothek, Munich, 4º Eph. pol. 5, ensuite série: 1770-1776 (même cote), au total 9 vol. (année 1769 en déficit depuis 1971). Collections importantes: Stadtarchiv, Clèves (série la plus complète); B.N., 4º Lc 10 325 (1769-1794, inc.; porte un monogramme «G.W.B.D.» et l'ex-libris armorié gravé de Casimir Pignatelli d'Egmond.); – 8º Lc 10 325 (oct.-déc. 1788); – G. 4510 (avril-déc. 1786); A.N., A.D. XX 1 144 (4 numéros de 1795); Ars., 4º Jo. 10141 (1789-1790, 1792, 1794-1795, 1797-1800, 1803); B.R. Bruxelles; B.U. Halle, (années 1781-1802); B.U. Cologne (années 1770-1780, 1782 inc., 1783, 1785); Bibliothèque archiépiscopale, Cologne, XI-855 (1 vol.); Fürstenberg Bibliothek, Herdringen, nº 845-850 (années 1783-1789); B.L., F. 339 (années 1781-1784, 1786-1801, inc.); Public Library, Bath (3 juil. - 3 août 1799); Biblioteca Trivulgiana, Milan (années 1785-1786, inc.); Library of Congress, Washington (années 1773-1777, 1779); Univ. of California, Berkeley (année 1792); Harvard Univ, Cambridge (année 1792); Univ. of Minnesota, Minneapolis (année 1794); Cornell Univ., Ithaca (années 1776-1777); State Historical Society of Wisconsin, Madison (années 1786-1794). Pour une liste des bibliothèques allemandes qui le possédaient avant la Deuxième Guerre mondiale, voir Standortkatalog wichtiger Zeitungsbestände in Deutschen Bibliotheken, Leipzig, 1933, p. 92: ex. à Berlin (P.S.B.), Munich (B.S.B.), Dusseldorf (L.S.B.), Cologne (U.-und S.B.), Bonn (U.B.), Brême (S.B.), Essen (S.B.). J. Kirchner (1931, nº 117A) cite une collection à Munster (U.B.). 8] Bibliographie H.P.L.P., t. II, p. 413-414; B.H.C., p. 90; G.H., 1865, p. 49; H.G.P., t. I, p. 288; DP2, art «Manzon». Quérard, t. V, p. 498; Kirchner 1931, nº 117A. Mentions: Le Courrier a suscité pendant sa longue existence de très nombreuses polémiques dues à son engagement politique et à la pugnacité de son premier rédacteur. Son principal adversaire fut la Gazette de Cologne avec laquelle il eut continuellement maille à partir. On citera encore: Gazetin de Bruxelles (1767) de Bastide (répliques du C.B.R., 1767, p. 145-146, 221-222, 253-254, 407-408; 1768, p. 31-32); Mercure de France (oct. 1768, p. 169-170, réplique du C.B.R., 12 nov. 1768, p. 727); Courrier de l'Europe (22 sept. 1778, p. 185, réplique à C.B.R., 18 sept. 1778); Correspondance allemande, Francfort, 1780, p. 24, 25, 31, 35, 37, 58, 117, 143, 240, 270; Correspondance politique, Amsterdam, 1782 (réplique à C.B.R., 1781, nº 94; 1782, nº 1). De Post van den Neder-Rhijn, 1784, nº 151, p. 233 (réplique à C.B.R., nº 46, 7 juin 1783; nº 54, 5 juil. 1783). Pour les polémiques personnelles, voir l'historique. Manuscrits: Ars., ms. 12430: dossier Aubry de Julie; B.N., ms. f. fr. 22154, fº 42, 50; – nouv. acq. fr. 1214, p. 142; A.N., F 18 242, pièce 199 et F 18 565-572. Archives diplomatiques, Cologne, Correspondance politique 108, 1777-1778, fº 243, 348-349. Varsovie, Archives d'Etat (AGAD), fonds Popiel 1777, p. 181-247 (correspondance de Manzon avec Coccei et Stanislas-Auguste Poniatowski, 1772-1791). Imprimés: 1767-1778: Bachaumont, Mémoires secrets, 1er, 9 sept., 31 oct. 1767; 15 oct. 1771; 4 juil. 1778. – 1769: Manzon J., trad. Beccaria, «Discours sur le commerce et l'administration», Journal des savants, Amsterdam, oct. 1769, t. XLI (II), p. 465-526. Manzon J., trad. Pilato di Tassulo, Projet d'une réforme à faire en Italie, Amsterdam, M.-M. Rey, 1769 (c.r. Journal encyclopédique, 1771, t. I, p. 238-246, voir aussi C.B.R., 19 août 1769). – 1772: Manzon J., éd., La Rochefoucauld, Réflexions et maximes morales, Amsterdam et Clèves, 1772 (B.N.; B.U. Amsterdam), avec une longue autobiographie de Manzon; rééd. Leipzig, 1773. – 1774: Bibliographie parisienne de 1769 (B.P.), Paris, 1774, p. XV. – 1783: Linguet S., Mémoires sur la Bastille, Londres, 1783, «III. Explication de l'Estampe». – 1784: Luzac J., Défense des Belges-Confédérés. En Hollande, 1784, 1re partie, passim. Vignette gravée représentant Manzon (B.N.; B. R. La Haye). Le Dîner au Lion d'Or, ou Aventures singulières arrivées en juillet 1783 [...] au Sieur Manzon, alias Fort en Gueule, Athènes, chez Jean-qui-pique, 1784 (B.N.; B.R. La Haye). La Riposte à Manzon, ou Chanson nouvelle, sur l'air: «Changez-moi cette tête», 1784 (B.R. La Haye). Jacobi et Lüder, Hollandische Staats-Anzeigen, Göttingen, 1784, I, p. 246-253 (trad. d'un extrait du Dîner au Lion d'Or). – 1787: Manzon J. (?), De waare vrijheid. Dor enen vrijheid lievenden Nederlander, Clèves, 1787 (B.U. Amsterdam). – 1788: Linguet S., Annales politiques, civiles et littéraires du dix-huitième siècle, Bruxelles, 1788, t. XV, nº CXX, p. 481-497. Bernard François, Précis historique de la Révolution qui vient de s'opérer en Hollande, Paris, 1788, p. 32-33. Frédéric II, Œuvres posthumes, Berlin, 1788, t. XI et XIV. – 1789: Schlözer August Ludwig von, Staats-Anzeigen, Göttingen, 1789, vol. XIII, p. 36-48 (extraits annotés de Linguet, 1788). – 1793: Manzon J., Nouveau Manuel philosophique et moral, Munster, 1793 (selon W. Heinsius, 1812-1813, t. II, p. 913). – 1797: Meusel Johann Georg, Das Gelehrte Teuschland, 5e éd., Lemgo, 1797, t. V, art. «Manzon», p. 37. – 1801: Swartzkopf S., Allgemeiner literarischer Anzeiger, nº 38, 9 mars 1801, p. 355. – 1822: Kopstadt, chanoine, Ueber Cleve. In Briefen an einen Freund aus den Jahren 1811 und 1814, Francfort, 1822, p. 30 (Stadtarchiv Clèves). – 1845: Warzée André, Essai historique et critique sur les journaux belges, Gand et Bruxelles, 1845, p. 166. – 1877: Koser R., Preussische Staatsschriften, Berlin, 1877, t. I, p. XLIV, note. – 1900: Pauls Emil, «Zur Geschichte der Censur am Niederrhein bis zum Frühjahr 1816», Beiträge zur Geschichte der Niederrheins, Dusseldorf, vol. XV, 1900, p. 98-101. Salomon Ludwig, Geschichte des deutschen Zeitungswesens, Oldenbourg, 1900, t. I, p. 127. – 1907: Ester Karl d', Das Zeitungswesen in Westfalen, Munster, 1907, p. 186-187 (B.N.). – 1909-1910: Ester Karl d', «Aus der Geschichte des Courier du Bas-Rhin», Dortmundisches Magazin, 15 déc. 1909, 1er janv. 1910. – 1912: Ester Karl d', «Das Ende des Courier du Bas-Rhin», Zeitschrift des Bergischen Geschichtvereins, vol. 45, 1912. Ester Karl d', «Die Deutschen Zeitungen in den preussischen Provinzen am Niederrhein», Forschungen zur Brandenburgischen und Preussischen Geschichte, Munich et Leipzig, vol. 25, I, p. 211-213. Benzel P., Niederrheinisches Geistleben im Spiegel klevischer Zeitschriften des achtzehnten Jahrhunderts, Bonn, 1912, p. XIX-XX, 40-45 (B.U. Fribourg). – 1913: Hauterive Ernest d', éd., La Police secrète du premier Empire. Bulletins quotidiens adressés par Fouché à l'Empereur, Paris, 1913, t. II, nº 638 (27 déc. 1805), 820 (18 févr. 1806). – 1924: Poniatowski Stanislas-Auguste, Mémoires, Leningrad, 1924, t. II, p. 244. – 1925: Hashagen, Entwicklungstufen der rheinischen Presse bis 1848, 1925, p. 6. – 1935: Hansen Joseph, Quellen der Geschichte des Rheinlandes im Zeitalter der französischen Revolution, Bonn, 1935, t. II, p. 27, 882, 1051; t. II, p. 13, 18. – 1952: Fabre Jean, Stanislas-Auguste Poniatowski et l'Europe des Lumières, Paris, 1952, p. 344-475. – 1960: de Booy J.-Th., «La traduction française de Di una riforma d'Italia de Pilati di Tassulo», Studies on Voltaire, t. XII, 1960, p. 29-42. – 1969: Lojek J., Polska Inspiracja prasowa w Holandii i w Niemczech w czawach Stanislawa Augusta, Varsovie, 1969 (résumé en français; contient en version originale plusieurs lettres de Manzon tirées des archives d'Etat: AGAD, p. 173-185) (B.N.). – 1970: Mortier R., éd., Difficultés sur la religion, Bruxelles, 1970, Introduction, p. 13-116. – 1974: Lojek J., «International French Newspapers and their role in Polish Affairs during the Second Half of Eighteenth Century», East Central Europe, vol. I, 1, [Pittsburgh], 1974, p. 60. Moureau F., «Lumières et libertés vues de Clèves par le Courier du Bas-Rhin de 1768», Bulletin de la Faculté des Lettres de Mulhouse, fasc. 7, 1976, p. 77-86. – 1977: Lojek J., «Gazettes internationales de langue française dans la seconde moitié du XVIIIe siècle» (Colloque de Lille, 1977), Modèles et moyens de la réflexion politique au XVIIIe siècle, Lille, s.d., t. I, p. 369-382. – 1977-1978: Jansen P., éd., L'Année 1768 à travers la presse traitée par ordinateur. Listings. I: auteurs; II: ouvrages, 1re et 2e parties; III: thèmes principaux; IV: thèmes secondaires, 1ère et 2e parties. Paris, 1977-1978, 6 vol. (dépouillement intégral du C.B.R. effectué par F. Moureau). – 1978: Lojek J., «Les gazettes internationales de langue française et leur rôle dans les affaires de Pologne au temps de Stanislas-Auguste» (en polonais), Problemy Kultury literackiej polskiego Oswiecena, Ossolineum, 1978, p. 135-150. – 1979: Jansen P., Moureau F., Van Dijk S., «L'événement dans les périodiques (1er mai - 31 août 1778)», R.H.L.F., numéro spécial, «Voltaire-Rousseau 1778-1978», mars-juin 1979, nº 2-3, p. 233-244. – 1980: Moureau F., «Sade avant Sade», Cahiers de l'UER Froissart, [Valenciennes], nº 4, 1980, p. 19-28. – 1981: Varloot J., Jansen P., éd., L'Année 1768 à travers la presse traitée par ordinateur, Paris, 1981, passim, dont: Moureau F., «Les Mémoires secrets de Bachaumont, le Courier du Bas-Rhin et les bulletinistes parisiens», p. 58-79. – 1982: Bonnet J.-Cl., «La presse et le problème alimentaire», Le Journalisme d'ancien régime (Lyon, 1981), Lyon, 1982, p. 271-278. Jansen P. et alii, L'Année 1778 à travers la presse traitée par ordinateur, Paris, 1982, passim (dépouillement intégral du C.B.R. entre le 1er mai et le 31 août 1778 effectué par F. Moureau). – 1983: Moureau F., «Les journalistes de langue française dans l'Allemagne des Lumières. Essai de typologie», Archives et Bibliothèques de Belgique, t. LIV, nº 1-4, 1983, p. 113-122 (résumé in Transactions of the Sixth International Congress on the Enlightenment, Oxford, 1983, p. 254-256). – 1985: Moureau F., «La presse allemande de langue française (1685-1790). Etude statistique et thématique» (Sarrebruck, 1981), Aufklärungen Frankreich und Deutschland im 18. Jahrhundert, Heidelberg, 1985, p. 243-252. Historique L'histoire du Courrier du Bas-Rhin est très directement liée à l'évolution politique de l'Europe de la seconde moitié du XVIIIe siècle et à la situation géographique du périodique (Moureau, 1983, 1984). Il naît après la guerre de Sept Ans sur les marches occidentales de la Prusse victorieuse. La gazette fut toujours un porte-parole fidèle de la politique berlinoise. Les bouleversements qui vont agiter le Nord de l'Europe avant 1789, de même que la Révolution française et l'impérialisme napoléonien la trouvèrent immanquablement sur la ligne de crête des positions prussiennes. Mais le Courrier eut la chance d'être dirigé par un journaliste de grande qualité, fût-il un peu trop sensible aux jouissances secrètes de la corruption. En 1767, la seule gazette franco-allemande de niveau international était la Gazette de Cologne qui défendait en terre d'Electorat ecclésiastique une politique ultramontaine et pro-autrichienne. Le Courrier fut son adversaire privilégié. Ancien novice de la Compagnie de Jésus, Jean Manzon, nourri aux sources holbachiques qui irriguent l'entreprise de Marc-Michel Rey à Amsterdam où il fit ses débuts (de Booy, 1960; Mortier, 1970), avait un caractère difficile qui amena ses employeurs de Clèves ou de Berlin (Moureau 1981) à vouloir le remplacer. Frédéric II le soutint, même contre d'Alembert (Linguet, 1788; Frédéric II, 1788; Hatin, 1859; Paul Schwartzkopf, 1900) et surtout à l'égard des pressions diplomatiques, anglaises (1801) et françaises (Paris, A.D.). Manzon dut rendre des services éminents à la cause prussienne et dédia des vers au monarque (C.B.R., 23 janv. 1768), ce qui ne l'empêchait pas de se laisser soudoyer par Stanislas-Auguste Poniatowski (Poniatowski, 1924; Lojek, DP2, Varsovie AGAD), par le Stadhouder (Luzac et divers, 1784; Bernard, 1788) et, sans doute aussi, par quelques émissaires français lui offrant un appui financier, de la part du duc d'Aiguillon (Varsovie, AGAD, lettre du 17 nov. 1772) ou de quelque autre ministre (Terray?). C'est dans la corruption universelle que Manzon pouvait, paradoxalement, conquérir sa liberté de parole. Les débuts du journal furent éclatants. Manzon avait du style et une patte terrible. Il s'agit d'une nature extravertie, histrionesque: son commentaire des Maximes de La Rochefoucauld tourne à l'autobiographie la moins déguisée (Manzon, 1772); il remplit sa gazette de ses propres a priori, de ses amitiés, de ses répulsions. Il pratique un journalisme à la première personne. Quelques mois après la naissance du Courrier, il fut interdit en France (11 nov. 1767) pour la publication d'extraits du Militaire philosophe (C.B.R., 10 au 24 oct. 1767, p. 238-270; M.S., 31 oct. et 31 déc. 1767; B.N., ms. f. fr. 22154, fº 42): cette décision de Choiseul fut rapportée le 28 décembre (ibid., fº 50), mais la diffusion par colporteur était proscrite (B.N., nouv. acq. fr. 1214, p. 514). A Clèves, la veuve Sitzmann, qui assurait l'impression de la Gazette, fut provisoirement chargée (C.B.R., 12 oct. 1768) de la gestion du périodique. Mais, le 5 novembre, Manzon reprenait la direction du journal (Ester, 1900; Moureau 1981), dès l'année suivante, cependant, contrôlée par un fonctionnaire prussien (C.B.R., 19 juil. 1769), dépendant de la «Chambre de Guerre et des Domaines». Par ailleurs, en tant que privilégié pour la diffusion des résultats de loterie, le journal versait une redevance au Hauptstempel Kartenkammer (service des jeux) de l'Etat prussien. Ces premières années du Courrier sont certainement les meilleures du journal (Jansen, 1977-1978) qui mêle agréablement l'information politique aux nouvelles du monde des lettres. Marmontel lui écrit de Spa (C.B.R., 3 oct. 1767: lettre de Bruxelles; 22 sept. 1767, inconnue à Renwick) pour se plaindre des journalistes de Bruxelles et de Bastide dont le Courrier fait la satire (Mémoires du temps ou Recueil de gazetins de Bruxelles); il donne de larges extraits de l'Ingénu (C.B.R., 16 sept. - 14 oct. 1767), suit attentivement les faits et gestes du Patriarche de Ferney, s'intéresse aux malheurs de Jean-Jacques et donne l'extrait des dernières productions holbachiques (Système de la nature, C.B.R., 10 sept. 1770; etc.). Politiquement, il défend dès l'origine la politique des Insurgents américains, se méfie des soubresauts de la Pologne catholique; idéologiquement, il poursuit d'une haine vigilante la Compagnie de Jésus et tout ce qui ressemble de près ou de loin à l'esprit ultramontain; il condamne les «économistes» français et les physiocrates qu'il va bientôt assimiler aux accapareurs pendant la guerre des Farines (Moureau, 1976, Bonnet, 1982). Doté de rares amis, Linguet, peut-être, qui se souvint qu'il l'avait soutenu aux jours noirs de la Bastille (Linguet 1783, C.B.R., 16 oct. 1793), Manzon multiplie ses ennemis sur tout l'échiquier idéologique du temps: depuis la Gazette des Deux-Ponts de Dubois-Fontanelle (C.B.R., 7 juil. 1770) jusqu'à son mortel adversaire, la Gazette de Cologne. Les plaintes se multiplient: d'Alembert, tel Liégeois trop ami des jésuites (Monfelt: 5 et 19 avril 1769), mais aussi les puissants qui se courroucent. L'ambassadeur d'Angleterre s'en plaint en 1770: le Courrier est mis à l'amende, d'ailleurs modérément (Pauls, 1900), on en bloque la diffusion à Paris (M.S., t. XXI, 15 oct. 1771); le résident de France à Bonn est exposé aux campagnes du Courrier (Paris, A.D.); Stanislas-Auguste Poniatowski utilise les grands moyens de la corruption pour arriver à ses fins et achète à prix d'or d'intéressants rectificatifs (Lojek; Varsovie, AGAD). Plus tard, l'ambassadeur anglais Elliott en 1788 (Schwartzkopf, 1801) et son homologue autrichien Metternich en 1791 (Hansen, 1935, t. I, p. 882) firent à son propos de très diplomatiques représentations. Entre 1770 et 1780, le Courrier perd de plus en plus son caractère littéraire. Il devient une simple gazette, de caractère particulier cependant (Moureau, 1980). Car Manzon n'hésite pas à intervenir, parfois mal à propos, dans le concert de la politique européenne. Suivant la ligne générale de la politique prussienne, il s'autorise cependant quelques obsessions personnelles: exaltation de la libération américaine, du renouveau politique français à l'avènement de Louis XVI. Mais cette manie de liberté se fourvoie souvent dans des culs-de-sac: la libération des Polonais du joug de la superstition les livre à la Russie, à l'Autriche et... à la Prusse; les mouvements qui agitent la Hollande et la Révolution brabançonne le font souvenir que ces contrées sont aux portes de la Prusse rhénane. Il se fit haïr des patriotes hollandais et belges (voir bibliographie de 1784 à 1788; Schwartzkopf, 1801; Hansen, 1935). La Révolution française le trouve dans ces sentiments, prussien de cœur, mais l'esprit encore exalté des idées les plus fortes des Lumières. Il l'accueillit d'abord avec une ferveur que les politiques allemands ne comprirent guère, on s'en doute. En 1791, von Waldenfels, ministre de l'Electorat de Cologne, l'accuse de susciter par ses écrits en faveur de la révolution parisienne des émeutes dans les territoires rhénans (Hansen, 1935, t. I, p. 1051); l'ambassadeur d'Autriche stigmatise au même moment ses «tendances démocratiques» («demokratische Gesinnungen») (ibid., t. I, p. 882). Mais en 1793, au moment où la guerre se déclare entre la Prusse et la France révolutionnaire, et où la Convention accélère le processus, le Courrier se retourne brusquement et brûle ce qu'il avait adoré. Echo dans la correspondance de Belle de Charrière (avril 1794). La cruauté jacobine, le vandalisme révolutionnaire, les discours incendiaires de l'assemblée, «l'athéisme» qui menace de devenir religion d'Etat (C.B.R., 25 déc. 1793) suscitent chez Manzon les malédictions les plus excessives qu'il réservait autrefois aux jésuites: «Vous avez trahi l'espérance du genre humain» (C.B.R., 30 sept. 1793). D'ailleurs les informations sont de plus en plus difficiles à faire parvenir de France. Les troupes révolutionnaires envahissent le Brabant; le 26 juillet 1794, paraît le premier numéro imprimé à Wesel où réside une forte communauté franco-wallonne (Ester, 1912). Clèves est abandonnée une première fois aux troupes françaises. Un retour à Clèves, début septembre, dure quelques semaines (C.B.R., 27 sept. 1794). Et la marée française engloutit le périodique, qui, contre mauvaise fortune bon cœur, se plie aux exigences des occupants, tout en doutant fortement de la liberté de la presse sous le nouveau régime (C.B.R., 17 juil. 1799). Ce qui n'était pas une erreur, puisqu'il fut interdit la même année en Rhin et Maas (Schwartzkopf, 1801), et en juin 1800, un certain nombre de numéros furent caviardés. Malgré des extraits du Moniteur complaisamment reproduits, Fouché lui trouvait «mauvais esprit» dans deux bulletins à l'Empereur de 1805 et 1806 (Hauterive, 1913); une autre note de police signale ses tendances anti-gouvernementales au début de 1806 (A.N., F 18 242). Il déménagea pour la dernière fois à Dusseldorf en mai 1806 (Ester, 1912) où il dut s'éteindre vers 1807-1809. La Révolution de France ou Correspondance avec un Etranger, Londres, 1792, 2 tomes de 52 numéros chacun, 29 sept. 1789 au 1er oct. 1791, est un periodique imprimé à Clèves sur les presses du Courier. L'abonnement se prend d'ailleurs auprès du directeur des Postes de Clèves. Il est possible que ce soit un sous-produit du Courrier du Bas-Rhin. François MOUREAU
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