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Dictionnaire des journaux 1600-1789, sous la direction de Jean Sgard, Paris, Universitas, 1991: notice 231 CORRESPONDANCE ALLEMANDE (1780) 1] Titres La Correspondance allemande ou Bibliothèque philosophique, politique, économique, historique et littéraire. 2] Dates 1780. Périodicité annoncée: tous les 17 ou 18 jours. Périodicité réelle: bihebdomadaire. 3] Description 2 parties en un volume (pagination continue: 416 p.). 26 numéros. Cahier de 16 p., 110 x 181, in-8º. Devise: Fraternitatis ubicumque vestigia. 4] Publication S.l. [Francfort]. «De l'Imprimerie ducale de Cosmopolis». J.J. Kessler. 5] Collaborateurs Auteur anonyme: «que pourrait importer au public de savoir qui nous sommes? Quand la malheureuse célébrité d'une vie tourmentée par d'injustes ennemis pourrait contribuer à nous procurer quelques nouveaux lecteurs, nous serions bien cruellement punis de cet avantage par la crainte affligeante que nous aurions de voir s'élever contre nous un public, juste sans doute, mais mal instruit et peut-être si prévenu que nous aurions peine à en obtenir la grâce de suspendre [...] son jugement sur tout ce qui nous regarde» (p. 117). 6] Contenu Intention du journaliste: «examiner la vérité des faits que tant d'autres écrivains se disputent l'avantage de leur rapporter [aux lecteurs], et leur [en] faire connaître, autant qu'il serait possible, la cause et les effets: c'est donc sous ce seul point de vue que nous espérons qu'on nous permettra de considérer la guerre que les Colonies anglaises soutiennent, depuis plusieurs années, contre leur patrie, et celle que la Maison de Bourbon, pour favoriser ces peuples révoltés, a cru pouvoir justement déclarer à une maison voisine qui, de tous temps, a excité sa jalousie et a été rivale» (p. 4). Principaux centres d'intérêt: politique, politique internationale, œuvre de Necker, France, guerre franco-anglaise, Amérique, Allemagne, franc-maçonnerie (p. 348-350). Publication d'un ouvrage en feuilletons: L'Allemagne considérée dans son état actuel et éclairée sur ses véritables intérêts (p. 223 et suiv., au total cinq chapitres). Principaux auteurs étudiés: Beaumarchais (p. 21, 81-85, 111), Lessing (p. 225-233), Pezay (p. 21), abbé de Saint-Pierre (p. 98). 7] Exemplaires Ars., 8ºH 26658. Un ex. à la bibliothèque municipale de Francfort en 1931 (voir Kirchner). 8] Bibliographie Kirchner 1931, nº 1753. – Strauss B., La Culture française à Francfort au XVIIIe siècle, 1914, p. 118 et p. 263. Historique La Correspondance allemande s'ouvre sur un éloge appuyé de Frédéric II: «La destinée de cet homme véritablement roi, grand guerrier, bon Prince, et sage législateur, doit toujours être de mériter autant l'amour de tous ses sujets qu'il fixe sur lui l'admiration de tous les hommes» (p. 10-11). D'autre part, la Correspondance allemande se définit clairement comme un organe de presse anti-français. Le peuple français lui-même n'est pas épargné: «Pourra-t-on croire que ce furent les Français, ce peuple si doux et si poli, qui apprirent aux autres nations à faire un odieux commerce de leurs semblables, et à vendre honteusement les Nègres, hommes comme eux, à d'autres hommes, pour les réduire à un état plus cruel que celui du plus vil animal» (p. 258-259). Mais c'est la politique de la France qui est la plus maltraitée. Ainsi en France, «c'est un crime de penser qu'on est libre» (p. 67). Les réformes de l'abbé Terray sont vivement critiquées: il se serait emparé «des intérêts dûs aux hôpitaux» (p. 74-77). Celles de Necker sont également vivement condamnées (p. 51-55). Le rédacteur admet que les fermiers généraux sont des «sangsues» qui font des «bénéfices immenses», mais c'est à cause uniquement de «la négligence que le gouvernement a toujours eue de prendre une connaissance exacte de la manutention des Fermiers, et la valeur réelle des droits qu'on leur afferme» (p. 50). La Correspondance allemande se distingue aussi par ses attaques très dures contre le rédacteur du Courrier du Bas-Rhin, accusé d'être pro-français (voir p. 24, 25, 31, 35, 37, 58, 143, 240, 270). Par exemple: «combien vous paye-t-on [...] nous ne voulons pas dire que pour les mensonges, mais pour les absurdes prophéties que vous débitez?» (p. 58). Autre exemple: «tous ses bons amis les Français convaincus du peu de réalité de son art prophétique et d'ailleurs attaqués d'une grande maladie économique, négligent, depuis quelque temps, d'envoyer dans sa caisse le tribut qu'ils lui payaient pour ses mensonges; dès que cette ressource a commencé à se tarir, son génie s'est tellement engourdi qu'il n'a même plus l'adresse de copier exactement les imprimés qu'il achète à très bon marché, pour les vendre très cher à ses lecteurs» (p. 270). Il règne dans le périodique une atmosphère quelque peu «voltairienne». Ainsi cette critique des maisons religieuses: «tant d'hommes [...] se rendent inutiles à l'Etat, par des vœux indiscrets: dès lors quelques Princes, éclairés par des sages conseillers, ont supprimé plusieurs couvents pour en employer les revenus à des établissements plus avantageux à la société» (p. 18, voir aussi p. 17). La Correspondance allemande s'est attiré l'hostilité «des plus redoutables puissances» en publiant en feuilleton l'ouvrage mentionné ci-dessus: L'Allemagne considérée dans son état actuel, etc. Les rapports de la religion et de la politique ont toujours été délicats; en n'étant pas suffisamment prudent, le rédacteur de la Correspondance allemande a fait interdire définitivement son périodique. D'«augustes personnes», pour lesquelles le journaliste se fait pourtant «gloire d'avoir la plus respectueuse obéissance» (p. 401), se sont en effet irritées de voir les arguments suivants dans la Correspondance: «aucunes puissances de l'Empire depuis la résolution de la Diète d'Augsbourg en vertu de laquelle les trois religions ont été également approuvées et autorisées, ne pouvaient dans aucun cas non seulement empêcher dans leurs Etats l'entier et libre exercice d'aucunes des trois, mais même que toutes personnes nées sujettes d'un Etat de l'Empire, quelle que soit celle de ces trois religions qu'elles professent, doivent également jouir des mêmes droits et privilèges; [enfin il est] aussi contraire aux principes de quelque religion que ce puisse être, qu'opposé à la raison, à l'équité, au bon sens, d'admettre ou de tolérer une religion dans un Etat quelconque, sans en permettre l'entier, plein et libre exercice» (p. 411-412). Hervé GUÉNOT
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